Les portefeuilles Quantalys en temps de crise

Publié le 22/11/2011 - Jean Paul Raymond
Les fonds obligataires plombent la performance des portefeuilles Quantalys sur les quatre derniers mois

Comme nous l’avions pressenti dans notre dernier article publié début septembre, nos portefeuilles modèles ont très difficilement résisté à la période baissière et volatile que nous connaissons depuis plusieurs mois.

La nature même des algorithmes utilisés, la fréquence de remise à jour (tous les deux mois) ainsi que l’horizon temporel sur lequel nous regardons en arrière (24 mois), éléments que nous avons décidé de ne pas modifier pour ne pas changer les règles du jeu en cours de route, rendaient presque inévitable la perte d’efficience des portefeuilles Quantalys.

Néanmoins nos portefeuilles ont connu des fortunes diverses et ce sont finalement assez paradoxalement les profils prudent et équilibré qui ont le plus pâti du retournement de tendance avec une sous performance par rapport à l’allocation de référence de 5.5% en 4 mois pour la période allant de début juillet 2011 à fin octobre 2011 pour le premier et 7.1% pour le second.

La caractéristique commune de ces deux portefeuilles est d’être investis pour moitié sur des fonds obligataires. Aussi, dans cet article allons-nous nous intéresser plus particulièrement à la partie obligataire des portefeuilles.

Dans les portefeuilles modèles de Juillet et Septembre, les fonds obligataires choisis par l’algorithme étaient les suivants :

- EDR signatures 12M de EDRIM Gestion géré par Guillaume Fradin

- R Euro Crédit (C) de Rothschild & Cie Gestion géré par Emmanuel Petit

- BNP Paribas Obli Long Terme(C) de BNP Paribas Asset Management géré par Patrick Barbe

pour les obligations Europe et

- Aviva Oblig International de Aviva Investors France géré par Jean Pierre Salles

- Objectif Alpha Obligataire A de Lazard frères Gestion géré par Alexis Merville

pour les obligations monde.

En comparant la performance de ces fonds aux indices de référence sur la période allant de début juillet 2011 à fin octobre 2011 nous avons les résultats suivants :

Ces écarts son énormes en particulier pour 3 fonds : Aviva obligations internationales et Objectif Alpha obligataire pour les Obligations monde et dans une moindre mesure R Euro Crédit (C) pour les obligations Europe.

Nous nous sommes procuré les derniers rapports de gestion disponibles de ces fonds pour chercher à comprendre la raison d’une telle chute.

1- Aviva obligations internationales

La lecture du rapport de gestion au 31 octobre nous apprend deux choses importantes sur la composition actuelle du fonds : bien qu’il soit classé en Obligations Monde diversifiées, il est en réalité investi à 94% sur des obligations Européennes (dont presque 50% en France).

D’autre part le fonds est intégralement investi en obligations provenant du secteur privé avec une grande partie provenant du secteur financier (50% du portefeuille est investi sur les banques et les assurances).

Il s’agit manifestement d’un pari de l’équipe de gestion, pari perdu mais assumé dans la note de gestion du fonds : « Sur le mois, les achats de la gestion ont principalement porté sur des titres corporate comme Telecom Italia, ENBW, Faurécia ou Europcar ainsi que sur les valeurs financières comme Crédit Agricole, BPCE ou CNP. »

2- Objectif Alpha obligataire

Le dernier rapport de gestion date de fin septembre 2011 et nous amène à un constat similaire au fonds précédent : le fonds, bien qu’officiellement en Obligations Monde diversifiées, est investi dans des produits risqués et atypiques. Ainsi la partie dette d’Etat ne représente que 7% du portefeuille, alors que les obligations corporate de sociétés financières représentent 27%, les obligations émergentes 32% et les obligations High Yield 26%.

Tous ces produits ont chuté de manière significative depuis le début de la crise de la dette et constituaient clairement un pari de la part du gestionnaire.

3- R Euro crédit

Le fonds est un fonds obligations corporate investissant dans les obligations investment grade, donc a priori moins risquées. Mais là aussi, le rapport de gestion d’octobre 2011 indique que le fonds est investi à presque 60% dans les obligations de sociétés financières. Il s’agit là aussi d’un pari de l’équipe de gestion assumé dans le commentaire de gestion :

« La stratégie du portefeuille basée notamment sur une résolution de la dette souveraine européenne a été illustrée en octobre par les bonnes performances absolues et relatives du portefeuille principalement grâce à la surpondération des émetteurs financiers »

Ainsi, dans les trois cas il s’agit de fonds obligataires pour lesquels les équipes de gestion ont fait le pari d’une résolution rapide de la crise de la dette, scénario qui ne s’est pas révélé exact.

Cependant si l’optimiseur a choisi ces 3 fonds obligataires c’est que leurs performances sur 2 ans jusqu’à début juillet 2011, c'est-à-dire ce que voit l’optimiseur au moment du calcul du portefeuille modèle, étaient tout à fait remarquables :

Cela montre que les positions audacieuses prises par les équipes de gestion peuvent s’avérer des choix payants sur le long terme, mais que cette stratégie peut s’avérer très risquée sur des périodes courtes particulièrement incertaines et volatiles.

En conclusion, il y a deux mois, nous avions prévu que les algorithmes utilisés et que leur paramétrage (que nous avions décidé de ne pas modifier), ne seraient pas optimaux dans les conditions de marché qui s’annonçaient. Mais nous n’avions pas prévu que la plus grande exposition serait le fait de trois fonds obligataires au profil somme toutes similaire du fait de leur forte exposition aux obligations bancaires.

Cette exposition constitue un acte de foi et un pari sur l’avenir de la part des gérants, pari qui ne s’est pas révélé payant, mais qui pouvait avoir une cohérence dans une vision plus optimiste de la situation. Nous sommes en tout état de cause face à une gestion audacieuse, avec des stratégies qui s’étaient justement distinguées jusque là par leur capacité à créer de la surperformance grâce à ce type de prises de positions.

Cela corrobore l'adage qui veut que les performances passées ne sont en aucun cas un gage pour les performances futures et cela nous montre aussi qu'en période de crise, ou de forte volatilité, il faut resserrer les délais d'intervention sur le portefeuille, être plus réactif et se placer dans une optique de court terme, y compris en travaillant dans le cadre d'une méthodologie quantitative (ce qui équivaut dans le cas précis des algorithmes utilisés à regarder en arrière sur une période beaucoup plus courte que celle de 24 mois prise par défaut).

Pour les deux mois qui viennent, de ces trois fonds, l’algorithme n’a plus retenu que l’un d’eux, le fonds Aviva oblig internationales, avec un poids moindre dans le portefeuille. Les deux autres ont été retirés du portefeuille au profit de trois produits au comportement beaucoup plus conventionnel et prudent: SSGA Euro corp industrial Bond, Axa Euro crédit et, dans une moindre mesure, SG obligations Monde.

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Jean Paul Raymond est associé fondateur, directeur du développement de Quantalys.