Solvency II : De la Transparisation à la Catégorisation ?

Publié le 27/07/2018 - Jean-François Bay
La Directive européenne du monde de l'assurance, Solvency II, à peine entrée en vigueur en 2016, fait déjà l'objet d'une révision dont les impacts s'annoncent majeurs pour l'industrie de l'assurance-vie. Une des premières simplifications concerne l'exigence de transparisation de tous les portefeuilles au profit des expositions aux différents facteurs de risque des fonds ou des moyennes de catégories.
  • Un premier amendement avant décembre 2018

En s'appuyant sur l'expérience acquise depuis 2016, la Commission européenne a souhaité réexaminer les méthodes, les hypothèses et les paramètres utilisés avec la formule standard pour le calcul du SCR (ou Solvency Capital Requirement qui correspond au capital cible nécessaire pour absorber les chocs éventuels provoqués par les risques majeurs pour chaque compagnie d’assurances comme un choc sur les marchés financiers). Plusieurs modules seront impactés par cette revue : risque de marché, prime et risque de réserve, risque de mortalité….

Cette revue de la formule standard se déroule sur deux grandes phases : Une première revue portant sur le risque de Taux, de Crédit ou la transparisation notamment pour une promulgation définitive des propositions d’ici fin 2018 en vue d’une entrée en vigueur en janvier 2019. En effet, la Commission Européenne souhaite rédiger un premier amendement au Règlement Délégué 2015/35 avant décembre 2018. Une autre révision de la réglementation Solvabilité 2, plus approfondie, est prévue avant 2021. Cette seconde clause de revue devrait porter notamment sur le paquet branches longues et sur le risque Actions, dont l’enjeu est de le réduire.

Les grands objectifs de cette révision sont : Simplification, proportionnalité, correction des incohérences techniques, notamment sur le risque de Taux et de Crédit, et enfin de faciliter le financement de l’économie.

  • Les contraintes de la transparisation totale ou « full look-through approach »

Dans le cadre de Solvency 2, et afin de calculer leur besoin en capital, les compagnies d’assurances doivent aujourd’hui collecter et agréger toutes les informations sur chacune des lignes qu’ils ont en portefeuilles. C’est ce que l’on appelle la « transparisation » totale des actifs. Si l’investisseur institutionnel n’est pas capable de fournir ce niveau détail pour un véhicule donné, celui-ci sera considéré comme une « action de type 2 non cotée » avec une charge en capital associée de 49 %, soit la plus lourde fixée par la réglementation.

Consciente du coût engendré par ce travail exhaustif de transparisation, et du problème de collecte et d’agrégation des données à une même date sur l’ensemble des portefeuilles, et afin de limiter la dépendance vis-à-vis des agences de notation par exemple, l’EIOPA (ou Autorité Européenne des Assurances et des Pensions professionnelles) a proposé récemment d’utiliser une méthode simplifiée « par regroupement »  ("simplified look-through approach" ou "grouping approach") quand la transparisation totale n'est pas possible. Cette méthode assouplie, qui permettra un moindre degré de granularité, est en fait basée sur les facteurs de risque des véhicules d’investissement (OPCVM, produits indiciels…) sous réserve que les véhicules soient gérés conformément à la dernière allocation/catégorisation connue (moins de 1 an) et que les expositions et les risques ne varient pas de façon importante sur de courtes périodes.

L’idée est donc, pour les fonds d’investissement, d’utiliser les facteurs de risque et expositions (sectorielles, géographiques…) de proxy standards, d’indicateurs synthétiques représentatifs comme les indices de marché ou les moyennes de catégorie, sous réserve que ces facteurs de risque et expositions des fonds en question soient stables dans le temps et vérifiables régulièrement (l’EIOPA parle d’une vérification minimale annuelle).

  • Les avantages des moyennes de catégories pour les fonds

L’utilisation des indices de marché n’est pas la panacée car elle reste soumise aux droits d’utilisation, avec un coût des licences parfois très élevé. Par ailleurs, alors qu’elle semble pertinente pour des fonds purs, elle n’est pas toujours adaptée pour des véhicules ayant une allocation stable plus complexe ou diversifiée.

En ce qui concerne les catégories de fonds, dans le cas des fonds de droit français, l'AMF (l'Autorité des Marchés Financiers) a mis en place sa propre classification. Problème : il n'y en a qu’une dizaine, donc pas assez pour refléter le profil précis d’un fonds d'investissement. Quantalys a donc créé son propre référentiel de catégories : au nombre de 145, elles permettent de regrouper des fonds ayant des objectifs d'investissement similaires. Elles sont calculées de manière indépendante et présentent l’avantage d’être disponibles en temps réel sur notre site :  http://www.quantalys.com/cat/fonds_categories.aspx

Autre évolution intéressante pour des assureurs qui mettent de plus en plus en avant les UC : Dans la réglementation en vigueur, lorsque la transparence n’est pas disponible, la part maximale des actifs pouvant bénéficier d’une approche dite “par regroupement” pour évaluer le SCR, est limitée à 20%. L’EIOPA préconise dorénavant que les actifs détenus pour faire face à des engagements en UC ne soient plus pris en compte dans le numérateur de ce ratio.

A noter enfin que lors de la consultation publique, il a été proposé à l’EIOPA d’intégrer des considérations ESG (environnementales, sociales et de gouvernance) dans les facteurs à analyser.

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Texte de référence : EIOPA’s second set of Advice to the European Commission on specific items in the Solvency II Delegated Regulation, 2018

Attention : Les informations sont fournies sont destinées aux professionnels. Ce document ne saurait constituer une publicité, ni une offre d’achat ou de vente. Il n’engage pas la responsabilité de Quantalys. Les performances passées ne sont pas constantes dans le temps et ne sont donc pas un indicateur fiable des performances futures.   

Jean-François Bay , Directeur Général, Développement international.