Small caps : en avoir ou pas ?

Publié le 06/11/2009 - Philippe Maupas
Zoom sur un segment du marché actions, les petites et moyennes capitalisations

Quoi de commun entre Total, 98 902 920 281 d'euros de capitalisation boursière et Toupargel, 173 776 450 d'euros de capitalisation boursière à la clôture de la séance du 6 novembre 2009 (source Euronext) ?

Toutes les deux sont des sociétés cotées, la première est la première capitalisation française, suivie par de très nombreux analystes dans le monde entier, présente dans de nombreux indices internationaux, la seconde est une société de taille moyenne, suivie par un nombre beaucoup plus restreint d'analystes et présente à la date de rédaction de cet article dans l'indice CAC Small 90 d'Euronext.

Total est une méga-capitalisation et Toupargel une petite capitalisation. Pour mémoire, la capitalisation se calcule à un instant t en multipliant le nombre d'actions composant le capital de la société par le cours de l'action. Plus la capitalisation est élevée, plus la valeur instantanée de l'entreprise est élevée.

Des similarités

Entre les géants de la cote et les petites et moyennes capitalisations, il existe de nombreuses similarités, la principale étant que les grandes et petites capitalisations évoluent généralement dans le même sens au même moment.

Le graphique ci-dessous compare l'évolution de la moyenne de deux catégories Quantalys sur plus de 10 ans : Actions zone euro en bleu et Actions zone euro petites et moyennes capitalisations en rouge. Si les évolutions n'ont pas toujours la même amplitude, elles vont dans le même sens au même moment, ce qu'atteste une corrélation de 0,88 entre les 2 catégories sur la période.

Pourquoi de telles similarités entre grandes et petites capitalisations d'une même zone géographique ? Parce que grandes comme petites, les entreprises vendent leurs produits et services à des acheteurs, qui peuvent être des consommateurs ou des entreprises. Elles dépendent donc de la situation économique générale. En période de croissance, les chiffres d'affaires et les bénéfices tendent à croître, l'inverse se produisant en période de récession (voir ici notre analyse du cycle économique).

Et des différences

Semblables dans les grandes lignes, les grandes et petites valeurs présentent également des différences.

Les petites et moyennes valeurs sont souvent moins diversifiées géographiquement que les grandes valeurs, et exercent généralement moins de métiers différents. Elles sont donc plus exposées à certains risques, que les grandes entreprises peuvent répartir sur différents métiers et différentes zones géographiques.

Par ailleurs, la majeure partie des transactions se porte sur les grandes valeurs, dont la capitalisation garantit souvent des échanges quotidiens élevés, donc une liquidité importante ; qui sont suivies par de nombreux analystes de par le monde ; et qui sont présentes dans les plus grands indices boursiers internationaux, servant de supports à de nombreux fonds indiciels.

A contrario, la liquidité des petites et moyennes capitalisations est moindre, elles sont couvertes par beaucoup moins d'analystes, ne sont par définition pas présentes dans les indices grandes capitalisations. Etant moins couvertes par les analystes, il est souvent dit qu'elles présentent plus d'anomalies de valorisation, permettant aux meilleurs gérants d'en tirer parti.

Les petites et moyennes capitalisations ont donc la réputation d'être plus volatiles que les grandes : elles monteraient plus brutalement, mais baisseraient également plus brutalement.

Une analyse empirique des catégories Quantalys Actions zone euro et Actions zone euro petites et moyennes capitalisations ne confirme pas nécessairement ces résultats.

Sur la période allant du 8 janvier 1999 au 6 novembre 2009 (voir graphique ci-dessus), la performance des petites et moyennes capitalisations est infiniment supérieure : 4,35% en annualisé, contre 0,02% pour leurs grandes soeurs. Quant au risque, mesuré par la volatilité des rendements hebdomadaires, match nul (19,91% pour les grandes, 19,60% pour les petites et moyennes capitalisations).

Si l'on zoome sur la période post bulle internet, du 10/03/2000 au 6/11/2009, la perspective s'inverse en matière de performance : avantage aux grandes capitalisations (-4,3% de performance annualisée, contre -5,09% pour les petites et moyennes capi). Et léger avantage en matière de risque pour les small cap (19,19% contre 20,10% pour les grandes capi). La corrélation est élevée, à 0,90.

Dans le marché baissier post bulle internet, du 10/03/2000 au 14/03/2003, avantage grandes capi, en baisse de 60% contre 71% aux small et mid.

Et dans le marché haussier allant du 14/03/2003 au 13/07/2007, nouvelle inversion de tendance : les small et mid font la course en tête, avec une performance annualisée de 32,71% contre 23,93% pour les grandes capi, et une volatilité de 11,32%, contre 12,10% pour les grandes capi (à noter le niveau anormalement élevé des performances et anormalement bas du risque).

Dans le marché baissier allant du 13/07/2007 au 06/03/2009, encore une inversion de tendance : les small/mid perdent 41,69% en annualisé, contre 39,61% pour les grandes capi, ces dernières enregistrant une volatilité supérieure (27,74% contre 24,54%).

Et, dernier épisode de la saga de 10, depuis la reprise, du 06/03/2009 au 06/11/2009, soit une période trop courte pour en tirer quelque enseignement que ce soit, les 2 catégories font à peu près jeu égal (+50,88% pour les small, +48,83% pour les grandes capi).

En avoir ou pas ?

Il nous semble utile d'ajouter une exposition aux petites et moyennes capitalisations à un portefeuille diversifié. Mais sauf à avoir des talents de prévisionnistes remarquables et être capable de sortir de ce segment du marché avant le retournement, il convient de n'y consacrer qu'une part raisonnable, c'est-à-dire minoritaire. Moins de 20% d'une zone géographique en petites et moyennes capitalisations nous semble raisonnable.

Parmi les catégories Actions Quantalys, on trouve des petites et moyennes capi pour la France, l'Allemagne, la zone euro, le Royaume-Uni, la Suisse, l'Europe, les Etats-Unis, le Japon et le monde.

Quelques idées en Actions France

Parmi les fonds Actions France petites et moyennes capitalisations, on pourra s'intéresser à Valfrance, à Cogefi Prospective ou à Oudart Opportunités France.

Moneta Micro Entreprises est un fonds remarquable, mais actuellement fermé à la souscription.

Quelques idées en Actions zone Euro

Parmi les fonds Actions zone euro petites et moyennes capitalisations, on pourra s'intéresser à Elan Midcap Euro, à Camgestion Euro Mid Cap ou à Oddo Avenir Euro.

Quelques idées en Actions Europe

Parmi les fonds Actions Europe petites et moyennes capitalisations, on pourra s'intéresser à Entrepreneurs, à Oddo Avenir Europe ou à Sextant PEA.

Quelques idées en Actions Etats-Unis

Parmi les fonds Actions Etats-Unis petites et moyennes capitalisations, on pourra s'intéresser à NIF Vaughan Nelson US Small Cap Value ou à Threadneedle American Smaller Companies.

Small Cap et ISR ?

L'univers des petites et moyennes capitalisations est moins couvert par les analystes "traditionnels", il est également moins couvert par les analystes ISR. On ne trouve que 4 fonds ISR parmi les catégories Quantalys Actions Petites et Moyennes Capitalisations, et sortent du lot UFG Sarasin Actions Euro Mid Cap et Federal Actions Ethiques. Ces deux fonds ont récemment bénéficié du label ISR Novethic (voir notre analyse ici).

Philippe Maupas , CFA, CAIA, CIPM, est co-fondateur de Quantalys et éditorialiste.