Trouver des diamants à l'état brut ? En quête de qualité dans le secteur financier

Publié le 18/10/2023 - JP Morgan Asset Management (Europe) SARL
Pour de nombreux acteurs de marché, il peut sembler contradictoire de rechercher de la qualité dans le secteur financier, puisqu’il est par nature un secteur « value », généralement bon marché et près peu souvent prometteur. Si ce constat est valable pour certains segments du secteur, ce dernier abrite néanmoins des sociétés de bonne qualité que nous cherchons à identifier pour le compte de nos clients. Toutefois, cette démarche implique un processus rigoureux afin de « séparer le bon grain de l'ivraie ».
isabelle.mast
Executive Director
International Equity Team

 

 
 

 

Pour commencer, demandons-nous pourquoi, en général, les valeurs financières sont jugées de faible qualité. Cela tient notamment à leur dépendance à l'égard des facteurs macroéconomiques, comme les taux d'intérêt et les perspectives des marchés actions et du crédit, de sorte qu’elles ne maîtrisent pas souvent leur potentiel opérationnel. Les banques sont l’exemple parfait. Les récentes révisions à la hausse des bénéfices dans le secteur bancaire sont parlantes : Pour nombre de valeurs bancaires, cette embellie est due à la hausse des taux d'intérêt, dont la trajectoire est à la fois difficile à prévoir et impossible à influencer par les équipes de direction. En outre, de nombreuses sociétés financières sont très cycliques, souvent sous l'effet des facteurs macroéconomiques, qu'il s'agisse de l'état global de l'économie ou de la santé des marchés financiers, qui se répercutent directement sur les actifs sous gestion. Inutile de revenir sur la crise financière mondiale pour trouver des exemples. Début 2023, l’effondrement d’une poignée de banques régionales américaines - de taille petite et moyenne - dans le sillage de la remontée des taux d'intérêt a déclenché la plus grande crise bancaire depuis 2008-09. Cet événement a été le fruit de modèles économiques relativement opaques et de nombreux facteurs influençant les cours de bourse, qu'il s’agisse de facteurs macroéconomiques ou des fondamentaux.

Selon notre équipe, la qualité d’une valeur financière repose surtout sur l’existence d'une rentabilité du capital d'exploitation durablement élevée. Toutefois, dans le secteur financier en général, la lourdeur de la structure bilancielle de nombreux modèles économiques pèse généralement sur la rentabilité. Au point que certaines valeurs financières n’atteignent pas nos standards de qualité. Les sociétés de qualité, telles que nous les définissons depuis plus de 20 ans, présentent notamment une rentabilité du capital d'exploitation durablement élevée (hors levier), des bilans solides et ont la capacité de financer leur croissance grâce à leurs flux de trésorerie existants. Des caractéristiques que les banques, par exemple, possèdent rarement ou sont incapables d’atteindre. Une banque affiche généralement une rentabilité de ses actifs (hors levier) inférieure à 1%, et ce avant un levier généralement supérieur à 10 fois. Les exigences en matière de bilan sont bien entendu le fait des régulateurs et leur évolution est parfois difficiles à anticiper, les décisions des autorités - et leur impact sur les bilans et les bénéfices - étant souvent imprévisibles. Il nous est donc impossible de détenir des banques dans nos portefeuilles dédiés au facteur « qualité ».

Même si les établissements bancaires ne répondent pas à nos critères, il existe des sociétés de bonne qualité dans d’autres segments du secteur financier et qui ont toute leur place dans nos portefeuilles. Les sociétés financières bien gérées et possédant des actifs incorporels solides dans les sous-secteurs présentant des structures bilancielles légères (comme les entreprises de marché, les spécialistes des paiements et certains segments de l’assurance) peuvent offrir les caractéristiques que nous recherchons, à savoir une rentabilité élevée, une cyclicité modérée et des revenus récurrents.

La rareté relative des valeurs financières candidates à l’intégration aux portefeuilles est plus facilement gérable pour une équipe étoffée et qui gère des portefeuilles à forte conviction et dont les décisions d'investissement ne dépendent pas des pondérations des indices. En outre, on observe souvent une déconnexion entre les cours de bourse et la valeur des activités sous-jacentes, ce qui peut offrir de bonnes opportunités aux spécialistes de la sélection des valeurs utilisant une approche bottom-up. Il faut certes redoubler d’efforts et posséder une solide expertise pour les identifier, dans la mesure où une décote de valorisation peut être le signe d'une opportunité d’investissement ou de difficultés bilancielles. Grâce à l’expertise de notre équipe dédiée aux valeurs financières (Anton Kryachok et moi-même ainsi que Bruno Paulson, Alex Gabriele et Richard Perrott qui assurent le suivi du secteur), nous sommes en mesure de repérer des investissements prometteurs pour le compte de nos clients.

Plutôt que de nous cantonner à une description théorique, nous préférons vous présenter certaines des valeurs intégrées récemment à nos portefeuilles afin de décrire notre processus de sélection des valeurs dans cet univers.

Société de courtage basée aux États-Unis
Dans le secteur financier, le courtage d'assurance est un terrain de chasse fertile pour nous. Il s'agit d'un segment d’activité peu gourmand en capital, dominé par quelques grandes entreprises et qui offre un potentiel de consolidation des courtiers plus modestes du segment des PME (petites et moyennes entreprises). Les courtiers aident leurs clients à souscrire une assurance à un prix attractif et à structurer son enveloppe. Ils leur prodiguent également des conseils dans divers domaines comme la gestion des risques, les exigences réglementaires et la gestion du capital. Pour nous, les courtiers en assurance sont des prestataires de services professionnels diversifiés possédant de bonnes perspectives de croissance des revenus, sous l’effet de l’augmentation structurelles des primes d'assurance, comme le changement climatique, les risques de cybersécurité et l'augmentation des recours judiciaires. Nous avons sélectionné cette entreprise, plutôt que ses concurrents, pour deux raisons. Tout d'abord, elle a créé une plateforme opérationnelle unifiée qui a permis à la fois d'augmenter considérablement sa marge d'EBITDA  (qui est passée de moins de 20 % en 2013 à près de 32 % en 2022)  et de supprimer les silos de son organisation pour améliorer son offre. Deuxièmement, la société est pilotée par une équipe de direction très fiable, qui a toujours su allouer le capital de manière pertinente au profit des actionnaires. Son activité est peu gourmande en capital, sa rentabilité est structurellement élevée - et en amélioration -, elle très peu exposée au cycle macroéconomique et possède une équipe de direction généreuse avec les actionnaires, autant d’attributs qui lui valent de figurer dans nos portefeuilles de qualité. Dernier aspect important, au moment de l'achat, l'entreprise se négociait bien en-deçà de sa valeur intrinsèque.

Deux entreprises de marché de premier plan
Deuxième exemple, celui de deux entreprises de marché (ou « bourses »), l'une basée aux États-Unis et l'autre en Europe. Leur rentabilité élevée par rapport à la faiblesse du capital employé, leurs revenus récurrents et leur cyclicité modeste, sans oublier des valorisations attractives, nous ont permis de prendre des positions dans certains portefeuilles mondiaux. Ces deux sociétés se sont distinguées de leurs pairs grâce à des sources de revenus diversifiées et à des barrières élevées à l'entrée, qui s’expliquent par un puissant effet réseau, des marques reconnues et de solutions logicielles devenues presque indispensables, sans oublier une gestion de grande qualité.

Société de paiement basée aux États-Unis
Les barrières élevées à l'entrée et les actifs incorporels solides protègent la rentabilité et les perspectives de croissance des entreprises de marché, ce qui nous a également incités à intégrer une société de paiement basée aux États-Unis dans certains portefeuilles mondiaux. Ce spécialiste des solutions de portefeuilles électroniques (e-wallets) peut se targuer d'une base d'utilisateurs en constante augmentation et d'une acceptation croissante des commerçants. Il bénéficie donc d’un puissant effet d'entraînement grâce à son réseau plus étoffé et à ses fonctionnalités supplémentaires, qui le rendent plus intéressant tant pour les consommateurs pour que les commerçants. Le secteur des paiements n’est pas nouveau pour nous : nous détenons une position sur un fournisseur mondial de premier plan depuis 2010, qui occupe une place de choix dans nos portefeuilles mondiaux.

Nous identifions généralement la plus grande proportion de valeurs de capitalisation (compounders) de qualité dans les secteurs de la consommation non-cyclique, des technologies de l'information et de la santé. Toutefois, notre approche bottom-up nous permet aussi de déceler les segments de qualité existant dans d'autres secteurs. Le secteur financier est un bon exemple et notre exposition à ce secteur en pourcentage du portefeuille global n’a cessé d’augmenter au fil du temps. Cela s’explique aussi par la mise à jour récente de la classification GICS (Global Industry Classification Standard) de MSCI, qui a transféré certaines valeurs liées aux paiements du secteur des technologies de l'information à celui de la finance au début 2023. Mais ce qui est peut-être plus important encore, c'est que l'étendue de l'expertise d'investissement de notre équipe de gestion de portefeuille nous a permis - pour reprendre les mots de Peter Lynch - d’effectuer des recherches plus approfondies et de trouver quelques diamants à l’état brut à intégrer à nos portefeuilles.

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